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Voici le récit de la visite de 7 Mastériens chez TIESA (Toyota Industry Equipment SA) à Ancenis (44). Cette usine, qui compte aujourd’hui environ 300 personnes fabrique des chariots élévateurs.

" Mardi 9 février, nous voilà enfin arrivés à l’entrée de Toyota. Depuis début octobre, nos intervenants nous présentent, nous font jouer les différents outils du Lean. Nous connaissons donc bien la théorie, nous essayons tous de les mettre en place, avec plus ou moins de succès, dans nos entreprises.

Mais Toyota, c’est le TPS : le système de production dont sont issus les principes du Lean ! Nous allons voir tous ces outils déployés et managés en même temps. Nous allons voir le TPS (Toyota Production System) fonctionner sur le GEMBA (terrain en japonais).

En préambule de cette visite, nous avons reçu un mail d’invitation comprenant un programme détaillé des différentes parties de cette demi-journée de visite. Comme indiqué dans le mail d’invitation, nous nous présentons au poste de garde : le gardien est prévenu de notre arrivée et nous informe qu’on nous attend à l’accueil. En effet, M. Bessin, responsable TPS sur le site, est là à l’horaire prévu pour nous distribuer les différents EPI obligatoires sur le site. Distribution faite, il nous conduit vers la salle Nagoya où M. Limouzin, General Manager Industriel, doit nous faire une présentation du site. En chemin, nous traversons deux immenses open space où se trouve l’ensemble du personnel administratif du site ainsi que le personnel commercial de TIESA Europe. Ici, rien ne permet de se cacher, il n’y a pas de meuble de plus de 1m20. On y aperçoit, d’ailleurs le président japonais (avec le même bureau que le reste du personnel !!), ou bien l’écran TV sur lequel défilent les différents panneaux ANDON. Le top management a ainsi en permanence une vision des différentes lignes de l’atelier.

M. Limouzin nous présente donc TIESA et le Toyota Way. Il nous présente d’abord le site d’Ancenis et nous apprend qu’avec la crise, l’usine a perdu 70% de son volume, et a ainsi dû réduire le rythme de production (TAKT TIME pour les initiés). Cela s’est accompagné d’un plan de départ volontaire. On nous explique alors que le respect des hommes étant une valeur fondamentale du Toyota Way, cela s’est fait avec un réel accompagnement à la fois financier et social. Dans le même sens, malgré un plan d’économie, la politique d’amélioration continue est plus que jamais maintenue.

M. Limouzin aborde également un autre point important du Toyota Way : la communication. Rien (ou presque rien) n’est caché aux collaborateurs : les sujets abordés au Codir le lundi matin sont ensuite diffusés via les réunions quotidiennes à l’ensemble du personnel avant le mardi midi. Par exemple, nous remarquerons que l’ensemble du personnel a été prévenu de notre arrivée. Nous passerons d’ailleurs par la suite devant les panneaux syndicaux, la liste de questions des délégués du personnel est vierge.

A l’heure prévue, on nous invite à mettre nos EPI pour commencer notre visite des ateliers. Nous l’entamons par la partie logistique qui est chargée d’alimenter les différents postes de travail avec les bonnes pièces, au bon moment. Tout est repéré par un système de lettres. Différents chariots sont préparés puis mis à disposition du Milkrun, petit train. En novembre dernier, lors de son intervention pendant une journée de formation, Jean Cottineau (ancien GM industriel du site) avait insisté sur les différents Kaizen (améliorations) réalisés sur ces chariots ; en effet tout est fait pour éviter les mouvements inutiles : un système de blocage des roues fait que l’on peut les manipuler facilement sans pour autant gêner la circulation du Milkrun dans les allées. Mais le plus surprenant dans cet atelier est l’ordre et la sérénité qui y règne : chacun semble connaître son rôle, à quel moment les pièces doivent être prêtes, seul le nécessaire est déballé, un signal visuel permet aussi de voir si la ligne est arrêtée : à quoi cela sert-il de continuer à préparer des chariots si la ligne est arrêtée, le Just in Time est une réalité chez Toyota.

Nous arrivons ensuite devant l’atelier « Kaizen Kobo », atelier de création de chariots Trilogic. On nous explique deux avantages à l’utilisation du Trilogic : dans un souci d’amélioration continue, on peut améliorer plus facilement qu’en mécano-soudé, et surtout, tout a été mis en place pour que les opérateurs puissent être sortis de la ligne et réaliser eux-mêmes leurs chariots (l’implication des hommes est un des principes du TPS) ce qui fait que la durée moyenne de réalisation d’un Kaizen est d’une semaine. L’un d’entre nous, perplexe, pose la question du prix de tels équipements, la réponse est sans détour : « en effet, c’est certes un peu plus cher, mais l’amélioration continue est une de nos priorité ; et chez Toyota quand veut quelque chose on sait s’en donner les moyens ».

Vient ensuite, l’atelier chaudronnerie. Première surprise, la propreté ; alors que tout le monde a l’image d’une chaudronnerie où tout est sale. Comment font-ils ? Il n’y a pourtant pas de 5S apparent. Et qu’est ce que ces cônes au dessus des fûts ? Il s’agit en fait de supprimer toute surface plane, on est ainsi obligé de poser son outil sur son support, l’atelier est aussi nettoyé régulièrement : on ne laisse pas la saleté devenir une habitude. La deuxième surprise fut de voir apparaître de nouveau un Milkrun, mais cette fois conduit par un personnel qui manifestement n’est pas de Toyota. Et pour cause, il s’agit d’un employé d’Arcelor-Mittal. Les deux sites étant séparés de quelques centaines de mètres, il a été construit une sorte de tunnel qui permet à Arcelor de distribuer ses différentes pièces en juste à temps. Là encore, nous avons ici un bel exemple de la chasse aux gaspillages (manutentions et stockages inutiles).

Alors que nous allions pénétrer dans l’atelier peinture, une musique de flûte de pan se fait entendre. Surpris nous nous interrogeons, il s’agit en fait du signal Andon, en levant la tête, le panneau Andon indique que le poste 11 de l’atelier a un problème ; et là en quelques instants le team leader vient en aide à l’opérateur, il l’aide à régler le problème, la musique s’arrête et l’opérateur reprend ses tâches ; tout cela sans provoquer d’arrêt de ligne. L’une des forces de Toyota est aussi de ne pas attendre qu’un incident devienne un problème.

Nous voilà finalement arrivé sur la ligne de montage. La première impression est paradoxale : à aucun moment les opérateurs ne semblent inoccupés mais aucun stress n’est apparent. Là encore c’est la sérénité de chacun qui surprend. Nous passons alors devant un tableau de marche : les indicateurs sont à jour. Comment est-il possible que les indicateurs soient à jour, que le 5S soit respecté alors que nous savons tous combien il est difficile de faire respecter les standards. La réponse est « Genchi Genbutsu », littéralement « aller voir sur le terrain ». En effet, une fois par semaine, le président japonais, le GM Industriel et la responsable TPS auditent deux ilots : suivi des indicateurs, respect du 5S, ….

Pour terminer cette visite, M. Bessin nous emmène dans la « War Room », lieu où a lieu quotidiennement une réunion des différents managers opérationnels du site. C’est ici qu’on identifie les problèmes et surtout qu’on capitalise sur les solutions issues du terrain. On pourrait donc s’attendre à ce que cette capitalisation se fasse sur une base de données informatique ; il n’en est rien, cela est considérée comme un muda, il y a donc des liasses manuscrites de documents de résolution de problèmes. Nous revenons finalement dans la salle Nagoya, où nous rendons nos EPI et faisons un point sur cette visite.

Nous quittons enfin le site exactement à l’heure prévue par le planning initial : Toyota et le respect des standards ! Alors que quelques jours auparavant Akio Toyoda, présentait des excuses mondiales pour les problèmes qualités de certains modèles de voitures, nous quittons le site persuadés que certes le TPS n’est pas parfait, il peut présenter quelques failles, mais reste un système bien plus performant que ceux que nous connaissons, notamment en ayant mis l’homme en son centre … »